Notre ciel d’étoiles basé sur le catalogue Gaia

étoiles Gaia vignette

Voici notre nouveau ciel étoilé.

Sa particularité : être généré à partir de coordonnées stellaires puisées pour l’essentiel dans le catalogue Gaia. C’est donc un ciel rigoureusement fidèle à la réalité – pour ne pas dire l’exactitude scientifique même.

Pour aboutir à ce résultat, nous avons revu notre méthode.

En fait, notre ancienne image ne convenait plus. Elle a longtemps habillé les ciels de nos films, mais en voulant la reprendre aujourd’hui, pour l’adapter aux besoins de notre nouvelle réalisation, nous nous sommes rendus compte qu’il était impossible de la modifier sans la dénaturer, et sans tomber sur des résultats aberrants, inexploitables.

Ce qui nous a donc poussé à repartir de zéro et à revoir notre technique.

En modifiant notre ancienne image, nous dénaturions nos étoiles

hipparcos

Notre ancienne image, dont les étoiles sont tirées du catalogue Hipparcos

Le problème était le suivant : à peine baissait-on la luminosité de notre image que nos étoiles se dénaturaient, devenaient grises, et disparaissaient plus vite qu’à la normale. De même lorsqu’on changeait la résolution de l’image (c’est-à-dire la quantité de pixels).

Ne pas pouvoir correctement modifier la lumière pour un film dont le sujet est la lumière, c’est embêtant. Ce qui se passait, c’est qu’on travaillait à partir de valeurs qui avaient été bridées.

Explications :

Comme nous l’avons dit, nous créons notre image à partir de données stellaires. C’est-à-dire des valeurs chiffrées qui nous donnent la position, la distance et la luminosité de nos étoiles.

Toutefois les lumières des astres sont trop intenses, les écarts lumineux trop grands, et les nuances trop fines pour être fidèlement représentées à l’écran.

Impossible de faire tenir tout l’éclat de l’univers dans une simple image numérique.

Si bien que lorsqu’on génère notre image, le logiciel réduit ces écarts. Seules les étoiles les plus brillantes sont impactées. Elles sont ramenées à l’intérieur d’un éventail plus restreint.

Concrètement, cela signifie que tous les éclats les plus intenses sont descendus à la même valeur. On ne fait plus de différence entre des étoiles très brillantes et d’autres étoiles un peu moins brillantes. Elles saturent à la même valeur. Elles deviennent un même point blanc – le blanc le plus blanc que puisse afficher l’écran.

— Bien sûr, quand on composera notre image, on trouvera quand même le moyen de les distinguer les unes des autres, en ajoutant un effet sur notre image : le glow, qui crée un halo pour simuler la brillance débordante de la lumière. Plus l’étoile brille, plus le halo est important. C’est notre façon de compenser la perte des valeurs de lumières et de recréer une différence de brillance entre nos étoiles. —
glow
Le glow : toutes les étoiles les plus fortes brillent d’un même blanc, mais leur couronne de lumière diffère.

Mais le problème, c’est que lorsqu’on reprend notre image pour la modifier, on a perdu les véritables valeurs de nos lumières. On ne les a pas sauvegardées. On repart donc de nos valeurs bridées.

Il nous reste seulement notre éventail restreint. Et c’est précisément cet éventail qui est en cause.

Puisque nos étoiles les plus brillantes sont ramenées à la même lumière, lorsqu’on baisse la luminosité de notre image, leur lumière diminue pareillement. Une petite étoile blanche devient grise, et se fond discrètement dans le noir. Tandis qu’une grande étoile blanche, devient une grosse tâche grise.

Toutes les étoiles changent de la même manière, là où nous voudrions justement qu’elles répondent différemment à nos modifications.

Face à une telle limitation, nous n’avons pas eu d’autre choix que de repartir de zéro. C’est-à-dire créer une nouvelle image en revenant à la source.

Nous avons puisé nos étoiles dans le catalogue Gaia

La source ce sont les catalogues d’étoiles. C’est là que nous piochons les données qui nous permettent de générer notre ciel.

Et tant qu’à générer une nouvelle image, autant revoir notre technique. Car pour l’ancienne, nous avions superposé deux plans. Un calque d’étoiles en premier plan, et une image de la Voie lactée en second plan.

Nous avions fait cela car nos coordonnées d’étoiles venaient du catalogue Hipparcos, qui répertorie les astres les plus brillants. La Voie lactée était donc absente du catalogue. Comme son nom l’indique, elle n’est qu’une tâche laiteuse pour nous, un énorme nuage de lumière dans lequel il est impossible de distinguer les étoiles dont les lueurs s’agglutinent. Mais un ciel sans Voie lactée n’étant pas envisageable, nous avions ajouté cette dernière, créant ainsi une image composite. (Voir les deux images slide, plus bas dans cet article ⇓)

Avec notre nouveau ciel, l’idée a été justement de générer toutes les étoiles de la même manière, y compris celles de la Voie lactée. Ne plus faire de distinction entre les points lumineux et l’amas de lumière en arrière-plan, mais tout générer ensemble.

Pour ce faire, nous nous sommes tournés vers un catalogue d’étoile plus fourni : Gaia.

À l’instar des autres catalogues, Gaia nous donne les coordonnées des étoiles. En fait, il nous donne même plus que cela. Comme indiqué sur son site, sa dernière version – la data release 2 – contient les positions, parallaxes, magnitudes et mouvements des étoiles. Mais le grand avantage pour nous, c’est surtout leur nombre : plus d’1,7 milliard d’étoiles sont répertoriées.

Et pourtant elles n’y sont pas toutes, seulement les lointaines. Gaia ne nous fournissait pas les constellations les plus brillantes comme la Grande Ourse, que nous sommes alors allés chercher dans un autre catalogue (Tycho).

Une fois toutes ces données injectées dans notre image, notre plus grande fierté a été de voir la Voie lactée se former sous nos yeux. Non pas une forme dessinée, mais bien des milliards de points, dont la position et la luminosité recréent un nuage complexe.

Chaque étoile qui compose notre image doit son éclat aux données fournies par le catalogue. Toutes, de la plus visible à la plus discrète, même noyée dans l’amas de lumière de ses sœurs, est présente à l’image.

Preuve de la justesse de notre méthode : nous nous sommes rendus compte après coup que dans notre ancienne image la Voie lactée était légèrement décalée. Sa position dans notre nouvelle image était différente, elle était juste. Nous avions créé un ciel fidèle à la réalité.

Maintenant, il fallait encore régler notre handicap initial, et trouver un moyen de conserver les valeurs de nos étoiles.

Nous nous sommes tournés vers l’HDRi.

Des nuances plus fines, un ciel plus profond

Le principe de l’HDRi – pour high dynamic range image – c’est d’enregistrer une plus grande gamme dynamique.

Alors oui, il existe toujours un plafond de valeur imposé par notre écran. Ce dernier ne peut pas afficher plus blanc que blanc. La technique HDR ne sert pas à cela. C’est chose impossible. En revanche, les nuances sont plus nombreuses.

C’est un premier avantage, et pas des moindres. Plus de nuances, c’est un réglage plus fin pour générer le ciel que l’on souhaite, sans compromettre l’information.

L’HDR permet de stocker toutes les valeurs, mêmes celles non accueillies dans l’image. On conserve l’information. On peut donc facilement retravailler notre image.

Mais on le devine bien, cette technique nous permet surtout de produire un ciel plus beau. L’image parle d’elle-même, surtout lorsqu’on la compare à l’ancienne. Chaque éclat d’étoile est rendu plus finement.

Une différence saute aux yeux, c’est le nombre d’étoiles. Dans notre ancienne image, le ciel en comptait moins. Nous avons expliqué pourquoi. Mais il faut aussi prendre en compte la qualité de l’image.

Ici, avec l’HDR, on rend mieux compte des nuances. On voit alors un ciel dégagé qui compte des milliards de petites lumières. Si on regarde bien, on voit que l’image est nappée de points lumineux. Même là où le vide semble profond, où nos yeux réagissent en croyant voir exclusivement du noir, on remarquera que des astres discrets y tiennent place. En zoomant, on verra apparaitre les étoiles petites – les plus lointaines.

Projetée sur une voute en planétarium, l’image est assez grande pour rendre compte de chaque détail. C’est là la force de l’HDR. Elle permet de rendre une image très précise qui ne perd ni la lumière des étoiles, ni le noir brut de l’espace. Les deux cohabitent.

Toutes les lumières sont plus nettes, plus vives, plus prononcées. Elles ne se sont pas fondues dans l’espace. En bref : elles ont plus de piqué.

En comparant les halos, on voit qu’eux aussi ont été rendus avec plus de précision. Ils ne semblent plus être des tâches aux abords des étoiles, mais sont plus diffus, et dans la continuité de leur source.